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L'Image Byzantine ou la transfiguration du réel

Tania Velmans

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Cet essai entend expliquer en quoi la sacralisation de l'image, qui a eu lieu à Byzance, influença aussi la manière de concevoir et de représenter l'espace et le temps.
- Apportant des avancées décisives, cet essai entend expliquer en quoi la sacralisation de l’image, qui a eu lieu à Byzance, influença aussi la manière de concevoir et de représenter l’espace et le temps, enjeux déterminants pour la formation et l’évolution du style.

Ces questions, pourtant fondamentales pour la définition du langage plastique, ont été abordées plus souvent par les philosophes que par les historiens de l’art. Leurs incidences, dans le contexte d’une approche de la forme, s’avère particulièrement éclairante. Singulièrement à partir du XIIIe siècle où les différences vont s’accentuer entre l’Orient et l’Occident, quant au traitement de l’image, en dépit d’une tentative de renouvellement à Byzance. La sacralisation de l’image byzantine reposait sur la croyance qu’un lien direct existait entre la représentation et le représenté. L’Image recevait les émanations, appelées également « énergies », de ceux dont elle traçait le portrait : privilège de l’authenticité puisqu’elle était considérée comme fidèle à un modèle archétypal (le prototype), obtenu par un miracle pour le Christ, une peinture exécutée d’après nature pour la Vierge, et des visages vus en rêve pour les saints. L’icône était, si l’on peut dire, doublement sanctifiée puisqu’elle participait à la liturgie et se trouvait être elle-même l’objet d’une vénération rituelle. Les textes nous l’apprennent avant les images, dès lors l’espace figuratif byzantin ne pouvait être qu’un lieu en dehors de tout lieu, voire un ailleurs resplendissant. En l’occurrence les artistes s’appuyèrent sur les écrits de Platon, de Plotin, des Pères grecs et des théologiens, et représentèrent un espace ou plutôt un non-espace réduit à une surface dorée. Ce fond étincelant et vide était un symbole de lumière divine et une figure de l’infini, sur lequel les personnages ne pouvaient qu’apparaître dématérialisés par la quasi absence de modelé, la souveraineté de la ligne rythmique, et leur position frontale. Une partie de l’ouvrage est néanmoins consacrée aux circonstances au cours desquelles la représentation de l’espace a été néanmoins appelée à évoluer d’un façon décisive. Cette révolution a lieu à l’occasion d’une renaissance précoce à Byzance, celle dite des Paléologues (XIIIe-XVe siècles) et accompagnée d’un retour identitaire aux œuvres hellénistiques, chronologiquement plus proches des Byzantins, que celles de l’époque classique. Les personnages devenus volumineux exigèrent un espace doté d’une certaine profondeur. Il fut simulé par des architectures empruntées aux modèles antiques et disposées, comme elles, vues de trois quarts. Seulement l’espace ainsi créé était trop proche de la réalité, alors que l’on cherchait à figurer des valeurs spirituelles. Aussi fut-il contrecarré et fortement limité par des horizontales barrant la composition (le mur de fond) et par le rapport conflictuel entre les édifices, dont chacun était perçu d’un point de vue différent. L’espace légèrement creux obtenu par ce procédé devint donc totalement discontinu. De cette façon, on resta fidèle aux principes fondamentaux de l’esthétique byzantine, et cela malgré l’évolution du style. La peinture italienne du VIIIe siècle, encore influencée par l’art byzantin, adopta la forme de ces édifices mais progressivement rectifia leur agencement, avant d’inventer au XVe siècle un espace à la foi approfondi et unifié. L’Auteur explique ensuite comment la représentation du temps suivit une évolution similaire à celle de l’espace. Aboli jusqu’au XIIIe siècle, il fut rendu ensuite d’une façon irrationnelle et discontinue, du fait de l’absence de raccourci, de la succession des épisodes évangéliques dans l’ordre des lectures liturgiques non pas selon la chronologie biblique, et de l’insertion des différentes séquences temporelles dans un seul et même champ figuratif, comme s’ils s’étaient produits simultanément (les Trois reniements de Pierre ou Gethsémani). C’est seulement exceptionnellement que l’on figure, comme en Occident, le calendrier, le zodiaque, les saisons et les travaux qui les caractérisent. Quant à l’écoulement du temps, très présent dans la sculpture des cathédrales, cette dimension tout comme celles de la violence, de la chair, du péché, de la fable, de l’épaisseur du monde, les artistes byzantins, les ignorent. Indifférents aux difficultés des hommes, ils leur assurent une félicité d’un autre ordre en leurs offrant un face à face avec l’éternité. Cependant, à partir du XIIe-XIIIe siècle la réflexion sur la fin des temps s’identifia, la piété devint plus sentimentale, et une nouvelle sensibilité par rapport à la finitude humaine et au temps, se manifesta. Tania Velmans étudie en quoi cet art funéraire, qui porte sur la mort, le péché, le corps, la femme, la damnation, s’inspire de l’occident et lui est diamétralement opposé. L’Essai s’achève sur l’incidence des grandes doctrines mystiques sur la création artistique. En particulier la manière dont le courant mystique de l’hésychasme, pourtant iconophile, donne un coup de frein à la renaissance des Paléologues. Mots clés : Byzance, espace temps, transfiguration, image, Platon, Plotin, Charlemagne, Paléologues, Constantinople.